© GrandPalaisRmn (Musée du Louvre) / Michel Urtado
Ecole française
Portrait de Marie Leczinska, reine de France ( 1703-1768)INVENTAIRES ET CATALOGUES :Cabinet des dessins
Fonds des dessins et miniatures
INV 27618, Recto
Anciens numéros d'inventaire :
NIII31738
LOCALISATION :Réserve des pastels
ATTRIBUTION ACTUELLE :DELATOUR Maurice Quentin
TECHNIQUES :Pastel sur papier bleu marouflé sur toile tendue sur un châssis assemblé à mi-bois avec entretoise horizontale. Sur le carton de protection arrière, numéro à la pierre noire : 26502
Les mesures du cadre sont : H : 01,04 ; L : 00,78 et profondeur : 00,145. Restauré en 2004.
La restauration de cette œuvre a été rendue possible grâce au soutien des American Friends of the Louvre en 2012.
H. 00,640m ; L. 00,540m
HISTORIQUE :Le 25 mars 1752, sur l'exercice financier de 1749, La Tour recevait le parfait paiement des huit portraits de la famille royale dont son mémoire (A.N., O1 1934 A, cité par Engerand, 1900, p. 270) précisait qu'ils représentaient à deux reprises le roi, à deux reprises la reine, à trois reprises Mgr le Dauphin, et une fois feue Mme la Dauphine, et qu'ils avaient été peints entre 1746 et 1749 : « Au sieur De la Tour, peintre, 1 100 livres pour faire, avec 10 900 à lui ordonnés acompte, scavoir 6 000 livres sur l'exercice 1745, les 19 may et 24 décembre audit an, et 4 900 livres sur l'exercice 1749, les 6 may, 3 aoust 1750, 28 mars et 9 octobre 1751, le parfait payment de 12 000 livres à quoi ont esté mis deux portraits du Roy, deux de la Reine, trois de M. le Dauphin et un de Mme la Dauphine, qu'il a faits en pastel pendant les années 1744, 1745, 1746, 1747, 1748 et 1749 » (Engerand, 1900, p. 270). Malgré le mémoire et les comptes des Bâtiments du roi, le pastel conservé au musée du Louvre figurant la souveraine est probablement le seul que La Tour ait livré. Sans doute fut il celui exposé au Salon de 1748 (no 78. La Reine). En 1784, Durameau inventorie dans la cinquième pièce des magasins de la Surintendance à Versailles un seul portrait de la reine (archives du château de Versailles,reproduction photographique du relevé des murs de la Surintendance,p. 18. Document original détruit). Saisie révolutionnaire. Inscrit sur l'inventaire général des musées royaux en 1832 sous le numéro 26502 comme inconnu : Portrait d'une dame présumée de la famille Royale. Elle a un voile noir sur sa coiffure (A.N., 1 DD 97, t. IX, p. 1979). Restauré en septembre 2004 et en 2012. À une date indéterminée, le pastel avait souffert de l'humidité. Des auréoles marquent le bord gauche et l'angle supérieur droit. Le papier d'œuvre s'était décollé de la toile de marouflage à l'angle inférieur gauche et à l'angle supérieur droit. À l'occasion du décadrage et de l'enlèvement du carton de fond est apparue sur le papier bleu doublant ce carton une étude au pastel du visage de la dauphine Marie-Josèphe de Saxe (INV 27618 bis) et sur la toile de marouflage une esquisse à la pierre noire pour un portrait féminin (INV 27618 ter). La restauration a permis le dépoussiérage de la toile de marouflage et la consolidation des angles décollés. En 2012, le pastel a été placé dans un cadre emboîtant.
Dernière provenance : Louis XV, collection de
COMMENTAIRE :Geneviève Monnier, Inventaire des Collections Publiques Françaises, Pastels des XVIIe et XVIIIe siècles, Musée du Louvre, 1972, n° 67.
Neil Jeffares confirme l'attribution à Maurice Quentin Delatour et l'identification du modèle, Catherine-Sophie-Félicité-MARIE Leszczynska, reine de France (1703-1768) (Dictionary of pastellists before 1800, Londres, 2006, p. 296).
Le pastel a fait l'objet de nombreuses copies. Citons la version ovale peinte à l'huile sur toile entrée au château de Versailles sous le règne de Louis-Philippe comme de l'école de Jean-Marc Nattier (inv. MV 4441.Voir Salmon, 2007, p. 136-137, 222, no 46, repr.). Besnard et Wildenstein citent en 1928 des copies au pastel dans les ventes Delaherche, 10-11 mai 1889, lot 177 (il ne semble pas s'agir de la version du Louvre) ; Ph. Sichel, 22-28 juin 1899, lot 31 adjugé à Perkins ; comte de B...,9 avril 1910, lot 7 adjugé à Mannheim. D'autres versions sont citées dans la vente X, 19 mai 1837, lot 82 ; dans la vente anonyme des 8-9 mars 1847, lot 49 ; dans l'exposition rétrospective de Bourges en 1870, no 76 ; dans la vente de la comtesse de L..., le 12 mai 1877 ; dans la vente de divers amateurs le 16 mars 1918, lot 14 ; dans la vente du château d'Hautefortle 28 novembre 1926, lot 126. Un dessin au crayon et pastel figure dans la vente X du 7 mai 1851, sous le lot 29. Une étude sur papier bleu rehaussé fut cédée lors de la vente Marcille le 4 mars 1857 sous le lot 249 et un autre dessin sous le lot 250. Geneviève Monnier cite encore en 1972 une copie conservée au musée des Beaux-Arts de Bordeaux (Toile. 0,65 × 0,54 m. Inv. 1431), celle de la préfecture et du musée de Nancy (cat. 1895, no 405), celle conservée sous le nom de Louis Tocqué au palais de Gatchina à Saint-Pétersbourg (Toile. 0,80 × 0,64 m) et celle conservée à Berlin (ancienne collection Cassirer, vente, Londres,23-24 mars 1926). Pour les nombreuses autres copies passées en vente,on se reportera au travail de Neil Jeffares (www.pastellists.com, Maurice Quentin de La Tour). Ajoutons seulement la copie à l'huile sur toile, en contrepartie et avec variantes dans l'habit, provenant de Hengrave Hall,dans le Suffolk,vendue par Sotheby's à Londres (Olympia) le 20 avril 2004 (lot 350. 0,819 × 0,645 m ; repr.)
Elle savait qu'elle n'était pas belle. Aussi Marie Leszczynska ne chercha-t-elle pas à multiplier les portraits d'elle-même tout au long de son existence. En 1748, Jean-Marc Nattier livra la dernière effigie pour laquelle la souveraine ait accepté de poser (Château de Versailles, inv. MV 5672). Elle avait alors expressément demandé à paraître en habit de ville. Exposée au Salon la même année, la toile fut louée pour son heureuse ressemblance et pour la noble simplicité de sa composition. Elle donna toute satisfaction à la reine, qui demanda à ce qu'elle devienne l'image officielle la figurant. Nattier avait comme à l'accoutumée adouci les traits de son modèle et cela n'avait pas été pour lui déplaire. La même année, Maurice Quentin de La Tour présentait également au Salon un pastel décrivant l'épouse de Louis XV en buste, vêtue d'une exceptionnelle robe à damiers, rubans festonnés et sourcils de hannetons, la tête couverte d'un voile de gaze noire (no 78). Sans concession, contrairement à celui de Nattier, le visage presque masculin respirait la bonté et ne laissa pas indifférent. Pour l'abbé Louis Gougenot (Lettre sur la peinture,sculpture, architecture, à M***, par une Société d'amateurs. Troisième partie : Examen des principaux ouvrages exposés au Louvre le 25 août 1748, cité par Besnard et Wildenstein, 1928, p. 44), le portrait de la reine était un chef-d'œuvre tant par la ressemblance que par l'art avec lequel les ajustements y étaient traités. Saint-Yves (Observations sur les arts et sur quelques morceaux de peinture et de sculpture exposés au Louvre en 1748,cité ibid., p. 44) n'était pas moins séduit. La douceur et la bonté de la reine étaient exprimées sur son front, dans son air et son maintien,que l'auteur avait si bien saisis. On applaudissait avec raison au beau choix qui régnait dans cette œuvre d'un si grand fini. La Tour savait indéniablement attraper dans chacun de ceux qu'il peignait cette situation habituelle du corps qui faisait presque deviner le caractère. Louis Guillaume Baillet de Saint-Julien se voulait tout aussi dithyrambique. Le pastel figurant Marie Leszczynska était au-dessus de tous les autres car on n'avait jamais vu saisir plus parfaitement l'exacte ressemblance. Et quant au détail, c'était tout ce que l'on pouvait de mieux traiter et de plus brillant (Réflexions sur quelques circonstances présentes, contenant deux lettres sur l'Exposition des tableaux du Louvre en 1748 à M. le comte de R****, et une autre à M. de Voltaire au sujet de sa tragédie de « Sémiramis », cité ibid., p. 46). Ainsi que nous l'avions écrit en 2004 à l'occasion de la rétrospective versaillaise dédiée à La Tour, nous pensons que le pastel exposé au Salon était celui que le maître avait peint en 1745. On sait en effet par le duc de Luynes (Mémoires, VIII, 1862, p. 205-206) que le 4 mai 1747, Carle Vanloo avait montré dans les appartements de Versailles son portrait en pied de la reine (fig. 43. Château de Versailles.Inv. MV 8492) dont la tête avait été peinte en copiant le beau visage que La Tour avait fait au pastel deux ans auparavant alors que la reine logeait chez le Dauphin. À l'occasion de la présentation de la toile au Salon la même année (no 3), Lieudé de Sepmanville avait à ce propos précisé que si la tête avait été copiée d'après le pastel, ce n'était que pour épargner des peines à la souveraine (Réflexions nouvelles d'un amateur des beaux-arts). La comparaison entre le visage peint par Vanloo et celui du pastel conservé au Louvre démontre en effet que le premier reproduit indéniablement le second (fig. 44), Vanloo s'étant contenté de supprimer le voile de gaze pour laisser paraître la perruque et surtout la parure de diamants et de perles, tout cela sans procéder à un quelconque embellissement physique. En raison de son extrême ressemblance, presque aussitôt après son achèvement,le pastel était devenu le prototype de nombreuses copies, certaines reproduisant à l'identique l'effigie de La Tour, d'autres, à l'exemple de la toile de Vanloo ou du portrait vendu par Sotheby's à Londres (Olympia) le 20 avril 2004 (lot 350, repr.), reprenant le visage seul en l'adaptant à une nouvelle composition. Bien que mentionné dans le mémoire établi en 1749, le second pastel figurant Marie Leszczynska semble en fait n'avoir jamais été livré. En 1763, l'œuvre restait en effet impayée. Le 1er août, La Tour dressait dans une longue lettre adressée à Marigny un état des portraits de la famille peints entre 1756 et 1762 et demandait le paiement d'un portrait de la reine et d'un portrait du Dauphin faits avant 1750 afin de pouvoir les remettre à la Cour (Besnard et Wildenstein, 1928, p. 65-66). Le 7 octobre 1763, il lui écrivait à nouveau en précisant que le mauvais temps l'avait encore empêché d'envoyer à ses frais les deux œuvres, tout en lui adressant leur reçu (ibid., p. 68). Les œuvres n'étaient peut-être jamais arrivées à Versailles. En 1784, Durameau n'inventoriait dans les magasins de la Surintendance qu'un seul portrait de la reine au pastel par La Tour. Le 20 septembre 1806, Jean-François de La Tour, le demi-frère de l'artiste, citait dans son testament parmi les œuvres restées en sa possession un portrait de Marie Leszczynska, épouse de Louis XV (no 24), qui devait être vendu avec toutes les autres pour financer les fondations instituées dans sa ville natale, l'école gratuite de dessin, le bureau de charité des vieux pauvres infirmes et le bureau de charité des pauvres femmes en couches (ibid., p. 127). Aujourd'hui perdue, cette seconde effigie de la reine de France était probablement celle pour laquelle La Tour n'avait jamais reçu paiement. Tout comme pour les deux exemplaires du portrait de Louis XV, l'attitude donnée à la souveraine sur cette œuvre était certainement différente de celle apparaissant sur le pastel conservé au Louvre, le maître s'appliquant à varier ses compositions (Xavier Salmon, Pastels du musée du Louvre XVIIe -XVIIIe siècles, Louvre éditions, Hazan, Paris, 2018, cat. 89, 179 à 181).
neiljeffares.wordpress.com/2018/07/12/the-louvre-pastels-catalogue-errata-and-observations, n° 89
INDEX :Personnes : Marie Leszczynska, reine de France
Sujets : portrait
Techniques : pastel
REFERENCE DE L'INVENTAIRE MANUSCRIT :vol. 11, p. 326