Les collections du département desarts graphiques Musée du Louvre
Mise à jour de la fiche 27/07/2022 Attention, le contenu de cette fiche ne reflète pas nécessairement le dernier état du savoir.

DELATOUR Maurice Quentin


Ecole française

Portrait de Philibert Orry, comte de Vignory ( 1689-1747).

INVENTAIRES ET CATALOGUES :
Cabinet des dessins
Fonds des dessins et miniatures
INV 27613, Recto

Anciens numéros d'inventaire :
NIII30883

LOCALISATION :
Réserve des pastels

ATTRIBUTION ACTUELLE :
DELATOUR Maurice Quentin

TECHNIQUES :
Pastel sur cinq feuilles de papier bleu assemblées à joints couvrants marouflées sur toile tendue sur châssis à mi-bois. Sur le panneau de bois protégeant l'arrière du pastel, numéros à la craie blanche : 3. G (?), 20-4. Les mesures du cadre sont : H : 00,145 ; L : 00,120 et profondeur : 00,012. Pastel et cadre restaurés en 2004. La restauration de cette œuvre a été rendue possible grâce au soutien de Joan et Mike Kahn en 2016.
H. 01,173m ; L. 00,906m

HISTORIQUE :
Collection de Philibert Orry, comte de Vignory. Exposé au Salon à Paris,en 1745, sous le numéro 166 : M. Orry. Ministre d'Etat, Contrôleur Général ; peint en grand. Probablement collection d'Antoine Chaumont de La Galaizière (1697-1783), chancelier de Lorraine et du Barrois, qui avait épousé en 1724 Louise Élisabeth Orry, soeur de Philibert Orry ; puis à son fils Antoine Chaumont de La Galaizière (1727-1812), intendant de Montauban, puis de Lorraine et Barrois et enfin d'Alsace. Saisie d'émigré, à Paris, en l'hôtel Chaumont de La Galaizière, ancien hôtel Gouffier de Thoix, 56, rue de Varenne, le 4 janvier 1798 (15 nivôse an VI) : « un grand portrait d'Argenson, fait au pastel par Latour, monté sous glace, hauteur 3 pieds 6 pouces sur 2 pieds 7 pouces environ » (Furcy-Raynaud,1912, p. 56-57). Envoi au Museum central des Arts. Restauré en octobre 2003 (décadrage, dépoussiérage de la toile de marouflage, suppression des moisissures, mise en place de nouvelles rehausses, réencadrement) puis en 2017 (dépoussiérage de la toile de marouflage). L'œuvre est toujours dans son cadre d'origine portant une estampille indiquant : ORNEMENTS / DE COMPOSITION / D.L (fig. 35), ce qui signifie que les éléments ornementaux ne sont pas sculptés dans la masse, mais en pâte. Le cadre a été restauré en juillet 2004.
Dernière provenance : Chaumont de la Galaizière, A.


COMMENTAIRE :
V.A.A.F, 1912, p.297. Il porte le ruban bleu et la croix de l'Ordre du Saint-Esprit. Geneviève Monnier, Inventaire des Collections Publiques Françaises, Pastels des XVIIe et XVIIIe siècles, Musée du Louvre, 1972, n° 62. Neil Jeffares donne ce pastel à Maurice-Quentin de La Tour, portrait de Philibert H. Orry, comte de Vignory (1689-1747), directeur des Bâtiments du roi, ministre d'Etat, contrôleur général (Dictionary of pastellists before 1800, Londres, 2006, p. 298). Une copie au pastel, probablement peinte au XIXe siècle, était sur le marché de l'art en 1983 (Paris, galerie Drouot, 12, rue Drouot). Probablement s'agit-il de celle signalée en 1984 par Pierre Rosenberg comme conservée dans une collection particulière à Sierre en Suisse (archives du département des Arts graphiques). On doit à Maurice Tourneux d'avoir identifié le modèle en 1904 grâce aux armoiries du livre qu'il tient en main, « de pourpre à un lion d'or rampant et grimpant sur un rocher d'argent, mouvant du côté droit de l'écu ». En effet, elles apparaissent également sur la lettre de l'estampe que François Bernard Lépicié grava en 1737 d'après le portrait du contrôleur général des Finances inscrit par Hyacinthe Rigaud dans son livre de raison à la date de 1734. La simple comparaison entre l'œuvre de Rigaud, connue par plusieurs versions, et celle de La Tour permet aisément de reconnaître le même homme. Descendant du libraire parisien Marc Orry, auquel il avait emprunté ses armoiries, et fils de Jean Orry (1652-1719), qui fut conseiller secrétaire du roi et président à mortier au Parlement de Metz avant de recevoir du roi d'Espagne l'administration de ses finances et la surintendance générale de ses troupes, Philibert Orry cumula les fonctions et s'imposa en homme de goût. Après avoir été brièvement cornette dans un régiment de cavalerie, il acquit une charge de conseiller au Parlement de Paris et devint maître des requêtes en 1715. Reconnu pour sa gestion rigoureuse, il fut chargé en 1722 de l'intendance à Soissons, puis en 1727 de celle du Roussillon,avant de rejoindre celle de Lille en 1730 pour fort peu de temps, puisque dès le 20 mars de la même année, sur recommandation du cardinal de Fleury, Louis XV lui confiait le contrôle général des Finances, laissé vacant par Le Peletier des Forts. À force d'économies, l'homme parvint à rétablir de l'ordre et acquit la confiance du roi. En décembre 1730, il était nommé conseiller d'État à vie, en novembre 1736 ministre d'État, en mars 1737, directeur général des Bâtiments du roi, Arts et Manufactures, en juillet 1742, conseiller d'État ordinaire et en février 1743 grand trésorier des Ordres du roi. De manières rudes qui auraient conduit sa belle-mère à dire lors de sa nomination au contrôle des Finances qu'il serait « à la cour comme un bœuf dans une allée » (cité par René Louis de Voyer d'Argenson, Journal et Mémoires, 1857-1858, t. II, p. 29), Orry s'aliéna Mme d'Étiolles. Depuis peu de temps la maîtresse du roi, elle était venue le voir afin de lui demander une ferme générale pour son mari Lenormant d'Étiolles. Il lui aurait alors répondu : « Si ce qu'on dit est vrai, vous n'avez pas besoin de moi ; si ce n'est pas vrai, vous n'aurez point la place » (cité par Vicque, dans la Nouvelle biographie générale, t. 38, Paris, 1864, col. 879). Disgracié sous l'influence de la marquise après s'être opposé aux frères Pâris, il laissa sa place à Machault d'Arnouville au contrôle général des Finances le 6 décembre 1745 et à Lenormant de Tournehemà la direction générale des Bâtiments. Lorsque La Tour livra son portrait avant août 1745, l'homme était encore tout-puissant. Le pastel se devait de le souligner. Aussi fut-il de dimensions imposantes. Depuis peu de temps, le pastelliste n'hésitait plus à se mesurer à la peinture à l'huile en donnant à certaines de ses œuvres des dimensions qu'aucun pastel n'avait eues avant lui. Aux Salons de 1741 et 1742, les effigies du président Gabriel Bernard de Rieux (Los Angeles, The J. Paul Getty Museum, inv. 94.PC.39) et de son épouse Suzanne Marie Henriette de Boulainvilliers (Paris, musée Cognacq-Jay, inv. 116) avaient déjà fait sensation. À celui de 1745, outre le pastel figurant Orry, le maître montrait également le portrait de Louis Duval de l'Épinoy (Lisbonne,Museu Calouste Gulbenkian, inv. 2380), de dimensions très légèrement supérieures, et qui fut considéré par les amateurs du temps comme « le triomphe de la peinture en pastel ». D'une manière qui lui était devenue habituelle lorsqu'il s'agissait d'œuvres où le modèle était représenté en pied ou aux genoux, La Tour avait peint le visage et le buste sur une feuille de papier, et le reste de la composition sur quatre autres morceaux de papier raboutés. Afin que cet assemblage fût le moins visible possible, les feuilles avaient été collées à joints couvrants dissimulés à l'aide du pastel. Personnage officiel, Orry apparaissait moins en protecteur des arts qu'en ministre, avec la longue perruque passée de mode caractéristique de sa fonction. Comme dans la plupart de ses pastels peints à la même époque, l'artiste s'efforçait de tromper la nature et d'éblouir ses contemporains en donnant aux matières un aspect presque tactile. Dans une lettre à Devaux datée du 7 septembre 1745, Mme de Graffigny demeurait éblouie par la plus belle moire gris de perle qui formait l'habit de Duval de l'Épinoy. On était prêt « à tater l'étoffe », rien n'était si admirable (cité par Jeffares, www.pastellists.com). En 1882, les frères Goncourt n'étaient pas moins éblouis par l'habit de Philibert d'Orry. Celui qui était encore désigné comme " l'homme au Saint-Esprit » étonnait par le miraculeux différenciement des trois noirs de son habillement, se touchant sans se confondre : le noir du velours de l'habit, le noir du satin de la doublure, le noir de la soie des bas. Indéniablement, La Tour s'imposait en magicien des matières (Xavier Salmon, Pastels du musée du Louvre XVIIe -XVIIIe siècles, Louvre éditions, Hazan, Paris, 2018, cat. 83, p. 166-168). neiljeffares.wordpress.com/2018/07/12/the-louvre-pastels-catalogue-errata-and-observations, n° 83. Sur le blason visible sur la couverture du livre, lire Nicolas Pinabel, L'héraldique et l'art du portrait en France au XVIIIe siècle, dans Les Cahiers d'Histoire de l'Art, 2019, n° 17, p. 32-49.

INDEX :
Personnes : Orry, Philibert
Sujets : portrait - Ordre du Saint-Esprit
Techniques : pastel

REFERENCE DE L'INVENTAIRE MANUSCRIT :
vol. 11, p. 325