BORDON Benedetto
Ecole vénitienne
Documenté en 1480/1488-1530
BIOGRAPHIE :
Enlumineur. 'La présence à Padoue, entre 1480 et 1488, de Benedetto Bordon, fils d'un barbier de la ville, est attestée par les documents ; il y fut sans doute initié à la profession d'enlumineur dans l'atelier de son beau-frère Anton Maria da Villafora, un maître d'origine et d'éducation ferraraises actif à Padoue dès les années 1470. Les premières œuvres de Bordon mentionnées par les sources, qu'il signe Benedictus patavinus, sont deux incunables du Digestum novum de Justinien et des Decretales de Grégoire IX, imprimés à Venise respectivement en 1477 et en 1479 (Gotha, Landesbibliothek, Mon. Typ. 1477. 20. 13 et Mon. Typ. 1478. 20.14) et appartenant à une prestigieuse série d'incunables enluminés pour Peter Ugelheimer, un financier allemand résidant à Venise. Bordon y emploie un langage ferrarais et padouan influencé surtout par Ercole de Roberti et par son suiveur le plus proche, le Maître des sept vertus, qui participa lui aussi à cette même série. Vers 1490, Bordon s'installa à Venise, où il poursuivit son activité d'enlumineur mais entreprit aussi avec succès une activité d'éditeur et de concepteur de gravures sur bois. Sur un exemplaire des Œuvres de Lucien (Vienne, Österreichische Nationalbibliothek, INC.4.G.27), édité par lui-même en 1494, son langage ferrarais originel s'altère en une dimension fabuliste, en des formes plus relâchées et un coloris plus fondu, conformément au goût pictural d'ensemble des années 1490. Entre la fin du XVe siècle et les vingt premières années du XVIe, il renouvela en profondeur la miniature vénitienne, qu'il mit à jour en fonction du naturel narratif, de la dilatation des formes et de l'intonation des couleurs caractéristiques à l'époque de la peinture de la ville. On mentionnera l'illustration de plusieurs éditions « aldines », parmi lesquelles un Martial de 1501 aujourd'hui conservé à la British Library (Inc.C4D11), mais surtout les nombreux documents liés à la vie publique de Venise, comme les Mariegole des scuole dévotionnelles et laïques et les papiers dogaux. Il faut notamment signaler la Mariegola de la scuola de Santo Stefano (1493, Venise, Biblioteca del Museo Correr, ms Cl.IV 3), les Commissioni dogales, par exemple celles adressées par le doge Leonardo Loredan à Francesco Garzoni en 1508 (Berlin, Kupferstichkabinett, ms. 78 C 30) et à Antonio Grimani (Venise, Museo Correr, ms. Cl. III, 908). Citons aussi l'importante Promissione, plus tardive, du doge Antonio Grimani (1521, Londres, British Library, ms. Add.18000). En 1523, la puissante abbaye bénédictine padouane de Santa Giustina lui confia l'illustration d'un Épistolaire (Londres, British Library, ms. Add. 15815) et d'un Évangéliaire encore plus somptueux (Dublin, Chester Beatty Library, ms. W. 107), où il mit en scène des épisodes animés de nombreuses figures, caractérisés par l'insistance sur la narration et par l'élan des mouvements, dans le cadre de scénographies architectoniques complexes ou de vastes paysages naturels. À la fin de sa vie, Bordon travailla au service du cardinal Domenico Grimani, pour qui il commença à enluminer, en 1528, un Évangéliaire laissé inachevé (Venise, Biblioteca Nazionale Marciana, Ms.Lat. I, 103= 11925), achevé plus tard par Giulio Clovio. Après avoir rédigé avec soin son testament, il mourut à Padoue en 1530.' - Giordana Mariani Canova dans 'Les enluminures du Louvre, moyen âge et Renaissance', catalogue raisonné sous la direction scientifique de François Avril, Nicole Reynaud et Dominique Cordellier, assistés de Laura Angelucci et Roberta Serra, Paris, 2011, p. 92.